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mardi 16 juillet 2013

Abordage au Musée du Biterrois

C'est le 18 mai, à Béziers, sous un ciel menaçant, gris, pluvieux, que se déroula notre seul abordage sonore de l’année. Qui n’était pas à proprement parlé un abordage sonore, puisque notre mission consistait à animer la Nuit des Musées. Les obligations des uns et des autres n’ayant pas permis d’avoir le Paratge des Sirènes au complet, c’est une petite délégation (Serge, Sylvia, Bruno, Patrice et moi) qui assura cet évènement.

J’arrivai la première (non, pardon, la deuxième : le premier sur les lieux était Serge, auteur du projet, qui tenait le rôle de garde-barrière à l’entrée du parking du musée pour nous permettre de nous garer). Arriva ensuite Sylvia, qui après une mauvaise blague de ma part, au téléphone, faillit se retrouver à l’autre bout de la ville et manquer ainsi l’heure du rendez-vous. Puis Bruno. Notre cinquième compère devant nous rejoindre en milieu de soirée, nous prenons sans plus tarder la route pour l’Espace Riquet, sur un chemin montant, sablonneux, malaisé, et de tous les côtés aux nuages exposé, qui eut vite raison de la cohésion de notre petit groupe.
Les leaders, Serge et Bruno, accentuent leur avance de minute en minute, sans un regard pour le reste de la troupe. Sylvia, qui a pris un mauvais départ et ralentie par les côtes, ferme le peloton. Quant à moi, qui occupe la difficile place du milieu, je suis tiraillée entre le désir d’attendre Sylvia qui me lance des appels de détresse, et celui d’accélérer le pas pour ne surtout pas perdre de vue les maillots à pois dans le dédale de ces petites rues de ma propre ville que je ne connais pas. Finalement, c’est essoufflés, échevelés, mais au complet, que nous faisons notre entrée à l’Espace Riquet, pour la première étape de la soirée. Un peu de visiteurs dans ce musée, curieux de nous voir débarquer chargés comme nous étions.

Les vielles tout juste sorties des housses, on se met à l’ouvrage avec "Chypre", puis "Ballo Francese", et après cette introduction, c’est à Bruno que revient l’honneur de présenter le Paratge des Sirènes. Nous reprenons au moment où est annoncée l’ouverture du buffet, devant un public concentré à se frayer un passage pour accéder aux boissons et petits fours. Nos morceaux, pourtant variés, ne se verront pas salués par des applaudissements reconnaissants et pour cause : un verre à la main et un toast dans l’autre, notre auditoire se trouve bien encombré pour nous témoigner sa gratification, mais peu importe, nous sentons que le cœur y est. D’ailleurs, la fin de notre petit récital approche et nous concluons par le "Se Canto", entonné par Serge, qui nous avait caché jusque-là ses talents de chanteur ; qui, si l’on en juge par les ovations du public, supplante désormais Luc, jusque-là encore inégalé dans ce domaine.

Quatre pour un Paratge © Marie-Thérèse Vezin

Notre prestation terminée, nous sommes invités au buffet, et, à la surprise générale, Bruno arrose cet évènement avec un verre de… jus d’orange !
Après cette première escale à l’Espace Riquet, le quatuor reprend le chemin du Musée du Biterrois. Les violonistes du Conservatoire, qui devaient partager l’animation de cette soirée avec nous, sont déjà installés. Leur professeur nous attend à la porte, et après une brève salutation, s’évertue à nous exposer sa requête : une fois décodées les multiples périphrases et hyperboles, entrecoupées de regards larmoyants dignes d’un dramaturge, nous comprenons qu’en guise de collaboration, il nous propose d’assurer le créneau 20h30 - 0h00, lui se réservant celui de 20h - 20h30, par souci de ses étudiantes (qui, comme chacun sait, doivent être bordées au lit avant 21h, surtout le samedi soir). Nous donnons notre accord, le laissant interloqué, surpris d’avoir gagné sans même avoir engagé les hostilités, un combat qu’il imaginait long et éprouvant. Le pauvre ne savait pas encore qu’il avait à faire à cette catégorie de personnes que l’on nomme pirates, qui s’emparent sans état d’âme de tout ce qui se trouve à portée de main.

Et c’est donc sur un fond musical, que nous prenons notre dîner, généreusement offert par le Musée. Présenté sur un joli plateau-repas, offrant presque autant de variétés que nos buffets R[o]ue de l’Amour, il fut tout de même bien différent de ceux que nous connaissions. Les discours enflammés et autres calembredaines qui rythment d’ordinaire nos repas laissèrent place, cette fois-ci, à une ambiance plus feutrée, quasi monacale, imposée par la sérieuse prestation qu’offraient les violonistes à ce moment-là, derrière la pièce où nous nous restaurions. Nous attendons même religieusement l’arrivée du vin avant de commencer, puis de Serge, qui, pour de mystérieuses raisons, n’aura de cesse de s’esbigner pendant toute la durée du repas.
Tiens, en écrivant ce mot, j’entends d’ici la question qui doit être sur toutes les lèvres : «  et notre signal repas ? ». Nous nous étonnons de son absence, alors que le dîner touche à sa fin. Allait-il faillir à la tradition et arriver une fois les réjouissances terminées ? Sans même avoir vu la couleur du plateau-repas ? Que nenni, notre fidèle camarade était bien là, et ce dès l’ouverture du premier opercule, mais à cause d’une défaillance de réseau, demeurait cantonné à la barrière du parking, sans moyen de nous rejoindre ni de nous faire connaître sa présence. Finalement, à force de persévérance, Bruno finit par capter le début d’un message, et Serge, qui revenait à peine parmi nous, s’en retourne aussitôt ouvrir à notre compère.

Ainsi au complet, nous prenons le relais des violonistes qui, les poches sous les yeux et réprimant à grand peine de longs bâillements, s’en vont au plus vite regagner leurs pénates pour récupérer de leur longue soirée. 
Nous investissons les lieux et improvisons un atelier débutant-déconstruction-confirmé, cette fois-ci hors de notre local, au milieu de vestiges historiques et autres œuvres d’art, attirant tout de suite l’attention des passants. Soucieux de satisfaire leur curiosité, nous transformons notre réunion en petit concert pour leur plus grand plaisir : tout notre répertoire y passe. Encore plus intrigués après cette prestation, les visiteurs nous assaillent de questions : « Questcequec’est ?, commentçamarche ?, pourquoic’estpaslesmêmes ?... » 

Cinq pour un Paratge © Marie-Thérèse Vezin

Tour à tour, chacun se lance, de bonne grâce, dans un résumé concis de la vielle à roue, emprunt d’images et de métaphores destinées à clarifier nos propos, mais tellement différent d’un avis à l’autre que nos visiteurs nous quittent finalement plus perplexes qu’à leur arrivée (leur demander un petit compte-rendu écrit sur ce qu’ils avaient retenu aurait été intéressant, et la lecture des réponses nous aurait certainement assuré un moment des plus divertissants).
Ce 18 mai est, également pour Serge, l’occasion de recruter de futurs paratgeaires, et il n’hésite pas à laisser les petitouts de passage tourner la manivelle de sa Siorat, espérant (tout comme nous) dénicher les futurs Clastrier ou Bouffard, que nous aurions avec fierté pu compter parmi nous à leurs débuts.

Une bourrée dans la Nuit des Musées © Marie-Thérèse Vezin

La deuxième partie de la soirée, plus calme, ressemble davantage à un atelier et nous permet d’aborder et de travailler quelques nouveaux morceaux. Absorbés que nous étions par l’élaboration de notre répertoire, nous nous apercevons à peine que le Musée s’est entre temps vidé de ses visiteurs, et c’est le gardien qui, revenant plus fois vers nous («  vous n’êtes pas trop fatigués ? », «  Il va falloir penser à partir on a programmé l’alarme ! »), nous fait réaliser que notre prestation s’achève. 
Patrice donne alors le signal du départ, avec cette phrase lancée comme un cri de ralliement «  On peut partir, car de toute façon j’ai fini mon plateau-repas ! », que l’on pourra, dorénavant, en souvenir de cette soirée, inscrire comme devise sous le logo de L'Écho, ou plus sobrement sur la housse de sa vielle.


Marie.

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